[Exclusif] La contamination des cours d’eau par les pesticides stagne en Bretagne

Tiré de l’info lettre de Splann !

Indice de suivi de l'écotoxicité provoquée par les pesticides en Bretagne

L’interdiction de certains pesticides n’entraîne pas de baisse de l’écotoxicité des cours d’eau. Les molécules retirées de la vente sont remplacées par des substances nouvelles… Jusqu’à leur propre interdiction.

L’écotoxicité est la mesure de l’impact des substances toxiques sur les organismes vivants dans divers écosystèmes. L’indice pesticides dans les cours d’eau (IPCE) a été développé dans le cadre du plan Écophyto pour mesurer la contamination chronique des rivières et ruisseaux. S’appuyant sur sa méthodologie, le data scientistVincent Berionni, sorti docteur de l’École polytechnique dans le domaine de la modélisation en sciences physiques et fondateur de la société Akwari Coop, a analysé les données de 161 pesticides issues de 7.100 stations de mesures en France, dont 463 en Bretagne (Loire-Atlantique comprise) entre 2011 et 2021.

Top des hausses et des baisses des contributions à l'écotoxicité des cours d'eaue n Bretagne

« Derrière cette apparente stabilité se cache un véritable chassé-croisé des pesticides », observe Vincent Berrioni, qui a accepté de réaliser pour Splann ! un zoom sur la situation bretonne. Ce « jeu de chaises écotoxico-musicales » est largement induit par l’évolution de la réglementation. L’Isoproturon, herbicide utilisé notamment sur le blé tendre d’hiver, a été retiré du marché français en 2016. Le Nicosulfuron, un autre herbicide, en 2022. L’Epoxiconazole, un fongicide connu comme perturbateur endocrinien, en 2019. Ce sont les trois substances dont la contribution à l’écotoxicité des cours d’eau bretons a le plus baissé.

Mais dans le même temps, la présence de Métolachlore s’est envolée. Or, l’autorisation de cet herbicide vient elle-même d’être retirée. « Pour que rien ne change, les labos s’empressent déjà de pousser le Diméthénamide-P et la Pendiméthaline à la rescousse », se désole Vincent Berionni.

Évolution de l'écotoxicité provoquée par les pesticides dans les cours d'eau bretons par sous-bassins hydrographiquesvolution de l'écotoxicité provoquée par les pesticides dans les cours d'eau bretons par sous-bassins hydrographiquesvolution de l'écotoxicité provoquée par les pesticides dans les cours d'eau bretons par sous-bassins hydrographiques

L’évolution de l’écotoxicité provoquée par les pesticides est très contrastée selon les sous-bassins hydrographiques de Bretagne. Des territoires ayant connu une hausse moyenne de 10 % à 20 % sur dix ans (de la pointe de Bloscon au Trieux) côtoient des secteurs où l’écotoxicité baisse de plus de 20 % (du Trieux à la Rance). Il faut noter que les zones où l’écotoxicité est en forte croissance ne sont pas forcément les plus contaminées.

De nombreux facteurs entrent en jeu, comme la météo. Les pluies entraînent un ruissellement des pesticides plus ou moins important selon les secteurs et les années. Des pluies abondantes peuvent favoriser la pousse d’adventices et un usage renforcé d’herbicide pour les éliminer. Les molécules dépendent aussi des cultures et des pratiques culturales. « L’augmentation de la surface cultivée en bio, même si elle représente une proportion faible du total, peut avoir un impact tendanciel à la baisse de l’écotoxicité », relève Vincent Berionni.

Pour rappel, 77 % de l’eau distribuée au robinet en Bretagne est prélevée en surface.

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