En Haute-Saône, France Relance la sylviculture industrielle.

Une expression démocratique requiert l’exposition de tous les points de vue. Cyberacteurs s’est toujours attaché à le faire et je l’en remercie grandement. C’est pourquoi, en réaction à la Lettre du développement durable citée par Alain dans son commentaire du 14/02 dernier, je viens témoigner de ce que j’ai quotidiennement sous les yeux dans le nord de la Haute-Saône et évoquer les failles du programme France Relance. Ici, les monocultures d’épicéas étant ravagées par les scolytes, on y effectue des coupes sanitaires. Jusque là, rien d’anormal.

Malheureusement :
– ces coupes rases concernent de larges zones et sont toutes réalisées « en même temps », ce qui bouleverse complètement les équilibres naturels qui s’étaient (re)créés sur ces secteurs depuis les années 70. Ainsi, les oiseaux des pessières (Mésanges noires, Roitelets huppés, Mésanges huppées, etc…) voient leur habitat disparaître complètement en un laps de temps très court et ne trouvent que peu de zones de repli ;
– ces coupes bouleversent totalement les paysages, les faisant ressembler à d’horribles champs de bataille ;
– ces coupes sont toutes réalisées avec des engins lourds (abatteuses et porteurs) qui tassent et abîment les sols. Après les abatteuses et porteurs, viennent les broyeurs forestiers, parfois la pelleteuse pour dessoucher, chargés de faire place nette. Certes, on broie les résidus d’épicéas (branches et parties non exploitables) laissés sur place, et ce broyat va alimenter les sols ; mais les petits arbres et arbustes (houx, sureaux noirs et rouges, saules, bouleaux…) qui avaient réussi à pousser entre les résineux et parfois à échapper aux roues des engins, sont passés à la moulinette également. Les nids d’oiseaux, les fourmilières subissent le même sort. Il ne subsiste rien qu’une vaste zone vide ! J’envoie quelques photos pour le blog. C’est alors qu’intervient le programme France Relance destiné à financer le reboisement de ces zones vides. Alléluia ! Des panneaux fleurissent un peu partout : « Reboisement financé par le gouvernement et l’Union européenne… Montant de la subvention accordée à …. » Des sommes folles sont distribuées. Le sont-elles pour un reboisement vertueux, respectueux de la nature, diversifiés et ayant tiré la leçon des erreurs passées ? Que nenni. Aucun contrôle n’étant effectué in situ, aucune obligation écologique n’étant formulée clairement : dans les faits et sur le terrain, FRANCE RELANCE LA MONOCULTURE DE RESINEUX ET LA SYLVICULTURE INDUSTRIELLE. Les épicéas sont remplacés par des Pins de douglas traités, alignés comme des maïs dans un champ, destinés à être récoltés dans 30/40 ans. Qui sait si d’ici là, ces plantations monotypes ne seront pas elles aussi attaquées par un ravageur ? Quant à la biodiversité, elle peut aller se faire voir ailleurs ! Errare humanum est perseverare diabolicum. Voilà la réalité de France Relance et j’ai bien peur que ce programme n’augure de ce que sera globalement le virage écologique du gouvernement Macron II. Sous la peinture verte, la rouille ? Pour étayer mon propos, ci-joint un article de Reporterre concernant le plan de relance forestier français :
https://reporterre.net/Le-gouvernement-finance-l-industrialisation-de-la-foret

Ils rasent et en plus, ils traitent !

La photo a été prise dimanche dernier, le 22/05. La fiche, agrafée sur un tronc d’épicéa au bas de la pile, indique que le traitement au Forester a été appliqué le 29 mars 2022. Le tas de grumes est donc stocké là depuis deux mois en attente d’enlèvement. Visiblement, les transporteurs n’arrivent plus à suivre la cadence des coupes !

Ce stockage prolongé en pleine forêt incite les forestiers à traiter davantage. De même que l’obligation de traiter les bois destinés à l’exportation, ce qui n’est pas rare. Il nous est déjà arrivé de croiser des camions “China Shipping” sur les petites routes de notre bout du monde haut-saônois…

Merci pour votre attention.

Merci à Francine pour ce texte et ces photos 

Be Sociable, Share!

18 réflexions au sujet de « En Haute-Saône, France Relance la sylviculture industrielle. »

  1. Un gros MERCI à toi, Alain, pour cette publication !
    Comme annoncé dans l’e-quotidien de ce mardi, l’association Canopée vient de saisir la Commission européenne à propos des dérives du plan français de plantations d’arbres (France Relance). Selon Canopée et selon ce que nous pouvons observer dans les régions concernées par les reboisements, ce plan favorise l’industrialisation de la sylviculture, les coupes rases et la monoculture de résineux. En conséquence, ses objectifs ne sont pas compatibles avec la volonté européenne de préservation de la biodiversité et de lutte contre les bouleversements climatiques.
    Face à la sylviculture industrielle et à ses nombreux soutiens jusqu’au sein de l’actuel gouvernement, les gens de Canopée se battent courageusement et font preuve d’une détermination rappelant celle des soldats ukrainiens. Qu’ils soient remerciés pour leurs actions et leur engagement !
    https://reporterre.net/L-Europe-saisie-contre-l-industrialisation-de-la-foret-francaise

    • L’exploitation de la forêt française est chapeautée par le Ministre de l’Agriculture et de l’Alimentation, poste occupé de 2020 à cette semaine par Julien Denormandie dont un des oncles, président d’une importante société d’exploitation forestière et de première transformation, a occupé d’importantes responsabilités dans la filière bois (Fédération nationale du bois, France-Bois-Forêt, ONF).
      https://fr.wikipedia.org/wiki/Julien_Denormandie
      Les liens étroits entre les figures politiques et les acteurs économiques mettent mal à l’aise et inspirent la méfiance. C’est du moins mon sentiment.
      Bien à vous, Francine

  2. Bonjour
    Il en est de même en Auvergne ou les coupes à blanc de résineux ou de feuillus dont ensuite passées à la pelleteuse pour faire des andains de branches et de souches afin de pouvoir replanter.
    Les sols sont gratés plus souvent dans le sens de la pente. Au premier oranges la faible couche de terre fertile est entraînée dabs les rivières et ruisseaux laussant place à des paysages jonchés de cailloux ou seul subsiste les résineux

    • Je confirme ce qu’écrit Pomalo. Nombreuses coupes à blanc de conifères sans se préoccuper des feuillus existants et des habitats d’oiseaux, insectes, mammifères de mon côté aussi au Sud-Est du Puy-de-Dôme. On replante exactement la même chose … produire … produire … Depuis 3 ans, nous ne comptons plus les espaces ravagés. Le matin, vous passez devant une belle parcelle de forêt (rarement mixte) pour aller au boulot ; le soir, vous repassez : il n’y a plus qu’un espace ravagé, des arbustes fracassés pour avoir eu la mauvaise idée de s’épanouir sur le chemin des engins dévastateurs.

  3. Bonjour
    Des citoyens de mobilisent,création d’une association pour laisser les forêts évoluer librement
    A reécouter en podcast carnet de campagne du 9mai sur France Inter, enfin une écoute de PHilippe Bertrand attentive, merci d’adhérer en masse nous avons besoin de votre aide pour sauver 20ha de foret
    Bien à vous
    Jeff

    • Bonjour Monsieur Petit,
      Etant donné la nature hautement écologique des actions que vous menez, je pense que Cyberacteurs ne m’en voudra pas si je mets ici un lien présentant votre association :
      https://www.helloasso.com/associations/libre-foret
      Quelques questions :
      – Est-il possible de passer outre la règle du pourcentage maximal (10%) pour les zones laissées en libre évolution dans les parcelles privées ? Si oui, comment ?
      – Vos parcelles seront accessibles à tous, décision que je salue, mais que se passe-t-il en cas d’accident ? Les assurances acceptent-elles de couvrir les propriétaires (individus ou associations) qui laissent la forêt en libre évolution ?
      – Comment fait-on pour vous soutenir ?
      Merci et bien à vous, Francine.

      • Bonjour Francine
        Réponse à la première question
        L’objectif de mettre en réserve en protection forte 10% du territoire concerne l’ensemble du territoire et nous en sommes loin, autour de 0.53 % pour le territoire métropolitain.
        Donc pas d’inquiétude de ce côté là à mon avis.
        Nos parcelles seront accessibles aux promeneurs aux simples conditions suivantes, ne pas sortir des sentiers balisés, ne rien cueillir, ne rien prélever, le long des sentiers un panneau décrira clairement les risques encouru par les promeneurs, et ils entreront en toute connaissance de cause dans la parcelle; donc d’après ce que nous savons auprès d’un tribunal il n’y aura pas photo, de toute façon le jeu en vaut la chandelle, sur ce point le conseil d’administration est unanime.
        Pour nous soutenir une adhésion via HELLOASSO, puis lorsque le propriétaire pourra nous vendre sa parcelle (autour du 15/06) nous ferons appel au financement participatif
        Voilà j’espére que j’ai répondu à toutes vos questions sinon n’hésitez pas à passer par le site internet de libreforet
        Bien à vous
        Jeff

  4. idem dans le LOT. On y déboise de partout,quitte même à rogner sur les terrains appartenant à d’autres propriétaires. Si vous posez la question:pourquoi? on vous répond :”oh, ça repoussera!!”

  5. Hélas, cette EXPLOITATION FORESTIERE, se repand partout en France. Idem ici en Bretagne, cotes d’armor et morbihan!!! Dans les cotes d’armor, c’est la société Lessard (les carrières de St Lubin, Plemet) qui détruit tout sur son passage il possède une grande partie de la fôret de Loudéac. Honteux, je ne reconnais plus la forêt de Loudéac. MC cordialement

  6. Dans le Cantal et la Corrèze… ça coupe raz raz raz… Quelle idiotie! Il faut faire pression pour que ces méthodes ne soient plus possibles!

  7. Est-ce que toute cela aurait une lien avec la promotion des poêles dits ‘écologiques’ à granules? ‘Bois Française’ etc écrit sur les sacs en promo….

  8. les milliards du coffre sans fond du Père Noël continuent à pleuvoir…
    La vraie pluie, elle, se fait rare. Dans le Rhône, l’année dernière, ils ont commencé à dire que les pins douglas étaient malades ; alors le but c’est quoi ??? Corruption et pots de vin ?

Répondre à Petit Annuler la réponse

Votre adresse de messagerie ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *