La Méditerranée, réserve halieutique ou nouveau site industriel français ?

L’Etat avait créé une Zone de protection écologique qu’il a remplacée par une Zone économique exclusive. Un simple changement de vocabulaire ?
Lors de la Conférence environnementale du 14 septembre 2012, François Hollande affirmait sa volonté de faire de la France «la Nation de l’excellence environnementale», ajoutant ne pouvoir admettre «la dégradation continue des ressources et du patrimoine naturel du monde» ou ne pas “rester impassible face aux atteintes irréversibles à la biodiversité» qui menacent plus de 30% des espèces. Aussi, nous devons créer de nouvelles réserves naturelles et faire appliquer la loi.”

Dans la mer semi-fermée d’une biodiversité exceptionnelle qu’est la Méditerranée, l’Etat avait créé une Zone de protection écologique, au large des départements des Bouches du Rhône et du Var dans laquelle se situent:
– le Parc national des Calanques pour la préservation de la flore et de la faune endémiques (espèces protégées terrestres et marines: mérou brun, phoque moine, grand dauphin, hippocampe tacheté, herbiers de posidonies: Posidonia oceanica, etc.);
– le Parc naturel marin du Golfe du Lion;
– le Parc naturel de Port-Cros, au large des îles d’Hyères, qui abrite le «Sanctuaire Pelagos» créé dans le but de protéger le fragile habitat des mammifères marins y vivant: dauphins, orques, rorquals, cachalots, etc.
Face à la prise en compte de ce patrimoine naturel d’une exceptionnelle richesse que constitue le domaine maritime, François Hollande convenait de valoriser la protection de la biodiversité marine mais, sur le rapport du ministre des Affaires étrangères, cette Zone de protection écologique a été abrogée, au profit d’une Zone économique exclusive (ZEE) sur un périmètre identique d’environ 70 milles marins.
Initialement annoncée comme moyen d’action contre la pêche intensive dans un des engagements du Grenelle de la Mer, la nouvelle Zone économique exclusive –si elle permet de lutter contre toutes les formes de pollutions (ce qui était déjà possible dans la ZPE, dégazages et autres pollutions maritimes volontaires, par exemple)– pose le problème de l’autorisation d’activités pouvant porter atteinte à l’environnement.
En effet, la nouvelle Zone économique exclusive autorise désormais «la circulation des navires», «la pose de câbles ou des pipelines sous-marins» ainsi que «d’autres activités tendant à l’exploration et à l’exploitation de cette zone maritime à des fins économiques» soit celles «de toutes les ressources minérales solides, liquides ou gazeuses in situ» et de «la production d’énergie à partir de l’eau, des courants (hydrolien) et des vents (éolien off-shore)» ainsi que la mise en place «d’ îles artificielles et autres installations ou ouvrages», et le droit exclusif pour l’Etat côtier «d’autoriser et de réglementer les forages sur le plateau continental».
Inquiétudes sur le permis de forer : Alors que l’opinion publique se rassurait après les déclarations de campagne de Nicolas Sarkozy en avril 2012 repoussant l’idée d’un forage en Méditerranée, le permis «Rhône Maritime» est toujours en cours de validité, puisque le gouvernement ne s’est pas prononcé sur sa prolongation, obligeant le député écologiste François-Michel Lambert à poser une question écrite à Delphine Batho, ministre de l’Ecologie. Car la ZEE permet de bénéficier de l’exclusivité du droit d’exploration et d’exploitation des ressources naturelles, et par conséquent de monétiser l’octroi des permis de recherches et d’exploitation!
En conclusion, sans anticiper sur la volonté du gouvernement (réserve halieutique ou nouveau site industriel), il faut, bien entendu, comprendre que dans «Zone économique exclusive»; on entend surtout une volonté «économique» et non plus «écologique» bien en-deçà des objectifs énoncés lors de la Conférence environnementale. Danièle Favari, juriste en droit de l’environnement
http://www.slate.fr/tribune/65407/mediterranee-reserve-halieutique-site-industriel

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