Maine-et-Loire jusqu’au 28 mai 2025 : consultation publique sur le projet d’arrêté autorisant deux périodes complémentaires de vénerie sous terre du blaireau

Le Projet d’arrêté

Alors que le tribunal administratif de Nantes a suspendu l’arrêté du 19 juin 2023 et que l’arrêté du 28 juin 2024 est contesté, la préfecture du Maine-et-Loire propose à la consultation du public un projet d’arrêtéautorisant deux périodes complémentaires de vénerie sous terre du blaireau, du 1er juillet 2025 au 14 septembre 2025 et du 15 mai 2026 au 30 juin 2026.

La préfecture a publié une note de présentation.

AVES Francevous invite à vous opposer à ce projet d’arrêté jusqu’au 28 mai 2025.

Important : pour que votre avis soit pris en compte, utilisez nos arguments pour rédiger une réponse personnalisée.

Modalité de réponse à cette consultation : 

Précision importante : tout le monde a le droit d’exprimer son avis sur ce projet d’arrêté, quel que soit son département de résidence.

Monsieur le Préfet de Maine-et-Loire,

Alors que le tribunal administratif de Nantes a suspendu votre arrêté du 19 juin 2023 et que l’arrêté du 28 juin 2024 est contesté par les associations de protection de l’environnement, la Direction départementale des territoires du Maine-et-Loire propose à la consultation du public un projet d’arrêté autorisant deux périodes complémentaires de vénerie sous terre du blaireau, du 1er juillet 2025 au 14 septembre 2025 et du 15 mai 2026 au 30 juin 2026.

Je souhaite déposer un AVIS DÉFAVORABLE à votre projet d’arrêté.

SUR LA FORME :

  • Vous rappelez en introduction à votre note de présentation que “l’article R. 424-5 du Code de l’environnement permet au Préfet d’autoriser l’exercice de la vénerie à compter du 15 mai de chaque année.” Pour semer le doute dans la tête du contributeur, vous affirmez même que : “Cette possibilité a été confirmée par le Conseil d’État, dans sa décision rendue le 28 juillet 2023.” Or, le conseil d’Etat rappelle dans son ordonnance que les chasseurs ont interdiction de tuer les petits blaireaux, conformément aux dispositions de l’article L. 424-10 du Code de l’environnement. D’ailleurs, de nombreux tribunaux administratifs sanctionnent désormais les arrêtés autorisant l’ouverture anticipée de la vénerie sous terre du blaireau pour méconnaissance de l’article L. 424-10 du code de l’environnement.
  • L’article 9 de la Convention de Berne n’autorise les dérogations à l’interdiction de porter atteinte aux espèces protégées qu’« à condition qu’il n’existe pas une autre solution satisfaisante et que la dérogation ne nuise pas à la survie de la population concernée pour prévenir des dommages importants aux cultures, au bétail, aux forêts, aux pêcheries, aux eaux et aux autres formes de propriété ». Pour être légales, les dérogations à l’interdiction de porter atteinte aux blaireaux doivent être justifiées par trois conditions, devant être cumulativement vérifiées : la démonstration de dommages importants aux cultures notamment ; l’absence de solution alternative ; l’absence d’impact d’une telle mesure sur la survie de la population concernée. L’exercice récréatif de la chasse est exclu. Or, la note de présentation n’apporte aucun élément pour justifier cette période complémentaire. Elle ne fournit aucune donnée fiable permettant de vérifier votre affirmation selon laquelle la population de blaireaux dans le département serait en hausse, ni aucun rapport de dégât de blaireau. Par ailleurs, il n’est mentionné nulle part la mise en place de mesures préventives qui pourraient facilement solutionner les rares dommages causés par ces animaux. Dans ces conditions, rien ne justifie la période complémentaire de vénerie sous terre du blaireau et le projet d’arrêté est donc entaché d’illégalité.
  • Vous semblez vouloir justifier l’ouverture anticipée de la vénerie sous terre du blaireau par une liste de dommages sans fournir la moindre donnée permettant de vérifier la véracité, la fréquence et la criticité de ces supposés dégâts. En ce qui concerne les dommages aux infrastructures, vous reconnaissez vous-même que votre administration adopte des arrêtés spécifiques pour mener ces opérations de régulation. La vénerie sous terre ne peut en aucun cas répondre à ce genre de problématique, ne pouvant pas être réalisée à proximité des voies ferrées, des routes ou des digues. D’ailleurs, même les destructions administratives ne sont pas une solution pérenne. Seules des solutions permettant un renforcement des ouvrages et la création de terriers artificiels permet de résoudre ces cas précis. Concernant les collisions routières, les blaireaux comme les autres animaux sauvages en sont les principales victimes. Il convient de diminuer la vitesse de circulation dans les zones concernées, et non de les tuer préventivement, ce qui est une aberration totale.
  • Malgré la suspension de l’ouverture de la vénerie sous terre au 15 mai 2024, les 35 équipages pratiquant la vénerie sous terre en Maine-et-Loire ont tué 388 blaireaux à partir du 1er juillet 2024. A ce chiffre, il faut ajouter les 100 blaireaux qui ont été tués lors de battues administratives. Malgré la méconnaissance des effectifs de blaireaux dans votre département, ce sont donc 488 blaireaux qui ont été tués.
  • Vous affirmez que l’article R. 424-5 ne conditionne pas l’application d’une période complémentaire au fait qu’il y ait des dommages reconnus, en omettant les autres textes qui protègent les blaireautins. La principale illégalité de votre projet d’arrêté repose sur le fait que vous n’êtes pas en capacité de démontrer que l’ouverture d’une période complémentaire de vénerie sous terre est indispensable dans votre département. Je vous rappelle que la vénerie sous terre peut être pratiquée légalement de mi septembre au 15 janvier chaque année, et que son ouverture anticipée doit être justifiée par autre chose que l’envie d’un groupe de chasseurs de pratiquer une chasse de loisir avant l’ouverture générale de la chasse. 
  • La vénerie sous terre n’est pas une pratique sélective. C’est une technique de chasse aveugle qui consiste à envoyer un chien dans le terrier pour acculer les blaireaux, puis détruire leur habitat pour les en extraire avant de les tuer. Dans plusieurs départements, la transmission par l’administration des chiffres des prises de blaireaux a prouvé que la vénerie sous terre conduit à la destruction des terriers et de l’ensemble de ses occupants, y compris des jeunes de l’année, dépendants et qui n’ont évidemment pas pu se reproduire. Le pourcentage de jeunes tués lors des opérations de vénerie sous terre peut dépasser 45% ! Elle s’ajoute à une mortalité déjà élevée chez les blaireautins.
  • Dans votre département, il n’y a que 35 équipages de vénerie sous terre agréés. Cela interroge quant aux moyens mis en oeuvre par votre administration pour autoriser une pratique récréative, les chasseurs affirmant eux-mêmes qu’elle n’a aucun objectif de régulation.
  • Vous affirmez avoir annexé une cartographie des collisions routières à votre note de présentation. Je vous informe que ce document n’a pas été mis à la disposition du public. Votre projet d’arrêté est annexé d’une note de présentation de deux pages, sans autre document complémentaire.
  • Dans l’introduction de votre projet d’arrêté, on peut lire « Vu l’avis des membres de la commission départementale de la chasse et de la faune sauvage réunis le 6 mai 2025. » Tout le monde sait que la composition de ces commissions est déséquilibrée et que les représentants des intérêts cynégétiques y siègent en majorité, mais vous ne précisez même pas quel a été l’avis de la CDCFS. Il aurait été pertinent de publier un compte-rendu de la CDCFS pour permettre au contributeur de savoir quelle a été la nature des débats et les éventuelles oppositions soulevées contre votre projet d’arrêté. De plus, l’avis de la CDCFS est seulement consultatif, et il est de votre responsabilité de faire respecter la loi et de ne pas céder aux chasseurs, alors que vous savez que votre arrêté sera une nouvelle fois attaqué devant le tribunal administratif.
  • Je me permets de vous rappeler qu’au moment de la publication de l’arrêté final, l’article L 123-19-1 du code de l’environnement stipule qu’ « au plus tard à la date de la publication de la décision et pendant une durée minimale de trois mois, l’autorité administrative qui a pris la décision rend publics, par voie électronique, la synthèse des observations et propositions du public avec l’indication de celles dont il a été tenu compte, les observations et propositions déposées par voie électronique ainsi que, dans un document séparé, les motifs de la décision. » Je vous remercie donc de bien prévoir la publication d’une synthèse des avis qui vous ont été envoyés.

LES JURISPRUDENCES EN FAVEUR DU BLAIREAU : 

Suite aux recours en justice déposés par les associations, les juges des tribunaux administratifs donnent de plus en plus souvent raison aux associations.

Dans leurs ordonnances, les tribunaux administratifs justifient la suspension ou l’annulation des arrêtés pour les motifs suivants :

  • Insuffisance de démonstration de dégâts
  • Illégalité destruction « petits » blaireaux
  • Défaut de recours à des mesures alternatives à l’abattage
  • Insuffisance de justifications dans la note de présentation
  • Méconnaissance de l’état des populations de blaireaux
  • Défaut de fixation d’un nombre maximal d’animaux susceptibles d’être prélevés
  • Irrégularité de la convocation des membres de la CDCFS
  • Risque sanitaire lié à la tuberculose bovine
  • Illégalité de l’article R.424-5 du code de l’environnement
  • Non respect de l’équilibre agro-sylvo-cynégétique
  • Maturité sexuelle des petits non effective
  • Insuffisance de démonstration de dégâts aux infrastructures

SUR LE FOND : 

  • Suite aux recours des associations, de plus en plus de départements reconnaissent l’illégalité des périodes complémentaires de vénerie sous terre du blaireau et ne les autorisent plus.
  • Cette pratique, appelée « vénerie sous terre », est particulièrement barbare et cruelle. Elle inflige de profondes souffrances aux animaux puisqu’elle consiste à acculer les blaireaux dans leur terrier à l’aide de chiens, puis, pendant plusieurs heures, à creuser afin de les saisir avec des pinces. Les animaux, dans un état de stress très important, sont ensuite achevés à la dague.
  • La vénerie sous terre met en danger les chiens qui sont envoyés dans les terriers et qui peuvent être blessés, répandre des zoonoses ou être tués par les animaux sauvages qui se défendent d’une agression extérieure. D’ailleurs, la Suisse a interdit cette pratique dans le but de protéger les chiens.
  • La vénerie sous terre n’est pas sans conséquences pour d’autres espèces sauvages. En effet, une fois l’opération terminée, les terriers, souvent anciens, se trouvent fortement dégradés. Or ces derniers sont régulièrement utilisés par d’autres espèces, dont certaines sont réglementairement protégées par arrêté ministériel et directive européenne, comme le Chat forestier (Felis silvestris) pour les départements concernés ou des chiroptères lorsque certaines espèces sont en phase d’hibernation pendant la période de septembre/octobre à fin avril : « Le Petit rhinolophe hiberne dans des gîtes souterrains (mines, caves, sous-sols ou même terriers de Renard ou de Blaireau) »source : Atlas des Mammifères de Bretagne éd. 2015.
  • Le Conseil de l’Europe recommande d’interdire le déterrage : « Le creusage des terriers, à structure souvent très complexe et ancienne, a non seulement des effets néfastes pour les blaireaux, mais aussi pour diverses espèces cohabitantes, et doit être interdit. »

À PROPOS DU BLAIREAU :

  • Les populations de blaireaux sont fragiles et souffrent de la disparition de leurs habitats (haies, lisières, prairies, …) et sont fortement impactées par le trafic routier.
  • Inscrit à l’annexe III de la Convention de Berne, le Blaireau d’Europe, Meles meles, est une espèce protégée (cf. art. 7). A titre dérogatoire, la Convention de Berne encadre strictement la pratique de la chasse et la destruction administrative de cette espèce (cf. art. 8 et 9). Le ministère de l’écologie doit soumettre « au Comité permanent un rapport biennal sur les dérogations faites ».
  • La dynamique des populations de blaireaux est extrêmement faible (moyenne de 2,3 jeunes par femelle et par an).
  • Cette espèce n’est jamais abondante (mortalité juvénile très importante (de l’ordre de 50% la 1ère année).
  • Une mortalité importante de blaireaux est liée au trafic routier.
  • Les opérations de vénerie peuvent affecter considérablement les effectifs de blaireaux et peuvent entraîner une disparition locale de cette espèce.
  • Les dégâts que le blaireau peut occasionner dans les cultures de céréales sont peu importants et très localisés, essentiellement en lisière de forêt. Selon l’Office National de la Chasse ONC bulletin mensuel n° 104 : « Les dégâts que peut faire le blaireau dans les cultures ne sont gênants que très localement (…) Et il suffit de tendre une cordelette enduite de répulsif à 15 cm du sol pour le dissuader de goûter aux cultures humaines. »
  • En ce qui concerne les éventuels dégâts causés sur les digues, routes ou ouvrages hydrauliques par le creusement des terriers, la régulation du blaireau a montré son inefficacité, voire même un effet contre-productif du fait de la place libérée par l’animal éliminé qui est très vite occupée par un autre individu.
  • Une méthode simple et pérenne consiste à utiliser des produits répulsifs olfactifs sur les terriers posant problème, ceci accompagné de la mise à disposition à proximité de terriers artificiels. Les avantages de cette solution sont que les animaux continueront d’occuper un territoire sur le même secteur et ne permettront pas l’intrusion d’un nouveau clan. (source : LPO Alsace)
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